Jean Philippe DOMECQ (extraits revue ESPRIT juillet- août 1991)

UN ÉCHANTILLON DE BÊTISE MODERNE:
La fortune critique d'Andy Warhol


                                Aux rieurs de 2010


... Or - et c'est encore une fois la farce  merveilleusement inventive de l'histoire-
notre siècle fait preuve d'un aveuglement aussi opaque à propos de l'art contemporain.
Comment? Par souci de ne surtout pas reproduire l'attitude conservatrice qui permit
au XIXe siècle de maudire ses artistes. Cette fois l'élite de l'opinion esthétique
ne se fera pas dire qu'elle a laissé passer Van Gogh et tant d'autres.
Aussi est-elle prête à accueillir toute nouveauté, toute nouveauté à priori
lui paraît significative. C'est la néophilie, qui, aux yeux des générations à venir,
caractérisera l'art moderne et frappera d'inanité les trois quarts de la production
artistique du XXe siècle, au bas mot. De cette néophilie, l'oeuvre de Warhol est l'image ultime...

...Que la néophilie en art  moderne ait nourri une bête hallucination collective, qui s'en étonnera?
L'homme séculairement se laissa berner par des religions, massivement entraîner par des idéologies
politiques; pourquoi l'art nous épargnerait-il? Surtout à notre époque où la liturgie artistique
est en train de prendre le relais des grands espoirs téléologiques que porta l'histoire après la religion....